Le 10 octobre 2023,  la Présidente de l'Assemblée Nationale, Madame Braun-Pivet a exprimé son soutien inconditionnel à Israël qui venait trois jours auparavant de vivre le pire pogrom commis depuis 1945.

"Horreur, sidération, angoisse, le monde est aujourd’hui en état de choc devant la violence de l’attaque terroriste qui a frappé Israël.
Devant cette barbarie, je veux redire ici qu’Israël est un pays ami à qui je veux réaffirmer, au nom de la représentation nationale, notre totale solidarité et notre soutien inconditionnel.
À l’heure où nous parlons, les combats se poursuivent et le nombre des victimes ne cesse de s’alourdir.
Nous pleurons également la mort de quatre de nos compatriotes et sommes toujours sans nouvelles de treize d'entre eux.... En hommage aux victimes, en signe de solidarité avec leurs familles comme avec celles qui sont sans nouvelles de personnes prises en otages ou portées disparues, je vous demande, mesdames et messieurs les membres du gouvernement, mesdames et messieurs les députés, de bien vouloir observer une minute de silence." (Discours du 10 octobre en ouverture des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale)

Mais de nombreuses voix se sont opposées à ce soutien.

 Il a été reproché à madame Braun-Pivet d'avoir exprimé un soutien au gouvernement de Netanyahu ce qui n'est pas dans ses propos.

L'esprit des contradicteurs est encore une fois de considérer qu'Israël est structurellement agresseur même s'il est agressé, ce qui laisse finalement toute latitude à un mouvement Hamas, mollement condamné pour ses excès dont on critique certes la manière (un peu brutale peut-être) mais pas la finalité (se débarrasser d'Israël par presque tous les moyens possibles).

Le magazine Orient XXI par exemple écrit ceci : "' Alors qu’Israël et ses alliés invoquent le droit international, y compris un soi-disant droit à se défendre, l’analyse des textes fondamentaux de l’ONU confirme le caractère mensonger de ces allégations. Les aspects juridiques de la situation dans le territoire palestinien occupé ne correspondent pas aux discours officiels tenus à Tel-Aviv. Sont ici en jeu, principalement, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le maintien de la paix, et le droit régissant l’occupation militaire."

Ce charabia laisse à penser qu'Israël occupant Gaza et martyrisant sa population, l'agression du Hamas est une réponse. Il faut donc s'arrêter là, la défense d'Israël étant alors une nouvelle agression.

L'auteur omet de préciser qu'Israël n'occupe pas Gaza depuis 17 ans , que les civils tués le 7 octobre sont Israéliens, pour la plupart civils, jeunes adolescents dont beaucoup n'étaient même pas Israéliens. Le Pogrom du Hamas n'est en aucun cas une réponse meurtrière à une oppression coloniale qui n'existe pas. Pour préciser les choses, le blocus conjoint de Gaza avec l'Egypte est la conséquence des actes du Hamas au début de la décennie 2000, pas sa cause.

C'est la première fois qu'un pays subissant une agression de cette ampleur se voit nier le droit à la défense.

La charte des Nations unies est très claire : "Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un Membre des Nations Unies est l'objet d'une agression armée, jusqu'à ce que le Conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales."

La question est donc celle de l'agression en retour. Israël se défend-t-elle ou au delà de la défense exerce-t-elle à son tour une agression envers Gaza. L'appréciation est éminemment subjective mais les éléments connus de tous laissent penser qu'une action militaire terrestre sans bombardement préalable aurait des répercussions très importante en termes de victimes chez dans l'armée israélienne qui bien sur protège au mieux ses soldats.

1. Cela est du au dense réseau de tunnel et à la diffusion de "l'armée " du Hamas parmi les civils.

2 .l'agresseur, le mouvement Hamas qui gouverne la bande de Gaza, n'a pas cessé son agression dans la mesure où il continue de tirer des roquettes sur les villes israéliennes (cibles uniquement civiles), détient, torture et assassine des otages, proclame par tous les canaux médiatiques possibles qu'il recommencera dès qu'il pourra, encore et toujours, des actions similaires au pogrom du 7 octobre. Il constitue donc toujours une menace.

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La tribune de deux avocats québécois Richard Marceau et Emmanuelle Amar1 ...... dans le Devoir (1er novembre 2023) fait utilement le point sur ce droit à se défendre d'Israël.

L’attaque meurtrière du Hamas sur Israël le 7 octobre dernier a bouleversé la planète entière. L’ignominie, la barbarie et la sauvagerie des actes posés, comme l’immolation de bébés massacrés, le viol de femmes, la tuerie de familles entières ou la fusillade de sang-froid de jeunes participants à une rave a provoqué un haut-le-coeur généralisé.

Depuis, Israël poursuit des opérations militaires pour neutraliser la menace perpétuelle que représente le Hamas non seulement pour ses citoyens, mais aussi pour ceux de Gaza, otages de ce groupe qui commet les pires atrocités du genre humain.

 

L’État d’Israël ne fait valoir que son droit légitime à se défendre et tente d’arrêter la pluie de roquettes qui continue d’être lancées contre les populations israéliennes.

La contre-attaque d’Israël a soulevé de nombreuses questions concernant le droit international.

Fondamentalement, Israël a le droit de se défendre. En l’absence d’un État palestinien, le Hamas est l’entité qui contrôle Gaza. Comme il y a une carence étatique à intervenir contre des groupes armés — en fait, le groupe terroriste responsable de l’attaque contre Israël est le Hamas, seul groupe qui exerce une autorité réelle sur Gaza à l’heure actuelle —, Israël se trouve dans la situation d’agir en légitime défense contre le Hamas. En plus du droit à la légitime défense codifiée et prévue à l’article 51 de la Charte des Nations unies, il existe aussi une version coutumière de ce droit. De cette pratique coutumière se dégagent trois critères pour que le recours à la force dans un cas de légitime défense soit légal : l’action de légitime défense doit être immédiate, nécessaire et proportionnelle à une agression armée.

 Depuis le 7 octobre, les citoyens israéliens vivent dans la terreur continue des sirènes leur sommant de se mettre à l’abri. Et pourquoi ? Parce que l’attaque du Hamas n’a eu de cesse depuis le 7 octobre. Le Hamas bombarde de roquettes de manière continue, depuis Gaza, des villes et villages israéliens. C’est une situation intenable.

 

Principe de proportionnalité

 Dans les moyens utilisés par Israël dans son action défensive contre ces attaques d’une envergure jamais connue des groupes armés du Hamas, la supposée disproportionnalité de la réponse est l’accusation lancée le plus souvent contre l’État juif.

Le principe de proportionnalité interdit « de lancer des attaques dont on peut attendre qu’elles causent incidemment des pertes en vies humaines dans la population civile, des blessures aux personnes civiles, des dommages aux biens de caractère civil, ou une combinaison de ces pertes et dommages, qui seraient excessifs par rapport à l’avantage militaire concret et direct attendu ».

Le droit international humanitaire cherche à limiter les pires effets des conflits armés, cela pour protéger les civils. Bien que tragiques, les pertes de vies humaines demeurent une réalité des luttes armées. Mais elles doivent l’être dans une mesure strictement nécessaire — par exemple des pertes de vies civiles non souhaitées et, oui, tragiques mais inévitables lorsqu’une cible militaire hautement stratégique est visée.

Ainsi, la proportionnalité n’exige pas que les dommages causés aux cibles militaires légitimes soient les mêmes de part et d’autre. Elle exige simplement que les dommages causés aux civils ne soient pas excessifs par rapport à l’avantage militaire concret et direct attendu d’une action.

L’objectif militaire d’Israël d’éliminer le Hamas est manifestement légitime. Chaque action posée en ce sens doit mesurer les pertes et son impact à cette fin.

Cette réalité n’immunise pas Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour minimiser les pertes ; il doit continuer à faire tout pour minimiser les pertes civiles [[le ministère de la Santé de Gaza — contrôlé par le Hamas — comptait plus de 8500 morts le 31 octobre] tout en sachant que le Hamas a comme pratique inhumaine de se servir des civils palestiniens comme boucliers humains — ce qui est un crime de guerre —, pour viser les civils israéliens — ce qui est aussi un crime de guerre.

Les victimes israéliennes depuis le massacre du 7 octobre se comptent par millier : 1400 personnes assassinées, plus de 200 otages aux mains du Hamas, dont 30 enfants. En fait, jamais depuis la fin de l’Holocauste n’avions-nous vu un tel massacre de Juifs en une seule journée.

Israël a non seulement le droit de se défendre, c’est en fait sa première responsabilité en tant qu’État. Plaider une fausse interprétation du droit international pour l’en priver doit être vivement dénoncé.

1. Le premier est vice-président et avocat-conseil du Centre consultatif des relations juives et israélienne (CIJA), ex-député fédéral et membre des Barreaux du Québec et de l’Ontario; la seconde est avocate, détentrice d’une maîtrise en droit international et directrice de la recherche en politiques publiques au CIJA.