Than Shwe a dirigé la junte millitaire de 1992 à 2011

L'homme a poussé la logique totalitaire du régime à son maximum

 

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1«Le secret de la réussite de Than Shwe est son absence de charisme, de perspicacité et de talent, ironise Benedict Rogers, auteur d'une biographie du tyran. Il était si effacé, si insignifiant, si obéissant qu'il n'était pas perçu comme une menace par ses supérieurs. Ils le récompensaient en lui donnant des galons.» Win Hlaing, l'opposant birman, lui reconnaît tout de même un don: «Il a dissimulé, sous un air benêt, des qualités de manœuvrier hors pair.» Comme Ne Win, dont il s'inspire largement, Than Shwe est le spécialiste des purges internes. Longtemps considéré comme un simple élément d'équilibre dans la rivalité qui opposait Khin Nyunt, puissant chef des services de renseignement, et Maung Aye, commandant en chef de l'armée, il s'est finalement imposé.

 

Un éléphant blanc dans son palais

Taciturne, sanguinaire, spécialiste des outrances xénophobes, le «Bulldog» est également mégalomane. Dans la nouvelle capitale qu'il a fait sortir de la jungle et qu'il a baptisée «la Demeure des rois», il ne se fait plus appeler que «Bu Daw», un titre emprunté aux anciens monarques birmans. Il a poussé l'analogie jusqu’à exiger un éléphant blanc dans son palais et à organiser un mariage princier pour sa fille en2006. Évalués à 50 millions de dollars, les cadeaux de mariage représentaient trois fois le budget de la santé.

 

Des histoires loufoques circulent à son sujet. À califourchon sur un cochon, il aurait fait le tour de la pagode Shwedagon pour conjurer une prophétie de ses astrologues. Il aurait ordonné à tous les paysans de Pegu (Sud-Est) de cultiver des tournesols, dont le nom birman signifie «long séjour». «Si seulement il pouvait se consacrer à ses passe-temps», soupire Win Nyant, négociant birman en jade: chanter à tue-tête le tube On se fiche pas mal des sanctions économiques de l'Occident, écrire des odes à la patrie ou regarder des films d'arts martiaux. Dans leurs rêves les plus fous, les Birmans le voient jugé pour crimes contre l'humanité."

 

Than Shwe à imposé le slogan ' « Amyo, batha, thathana » : une race, une langue, une religion qui met en avant les boudhistes bamar. Sous sa férule, la primauté de l'armée est absolue. Le nombre de soldat de Tatmadaw est passé de 180 000 en 1988 à 400 000 en 2000.

 

1Florence Compain Mis à jour le 08/11/2010 Le Figaro