PALESTINE, (Géogr. mod.) la Palestine, ou la Terre-sainte, ou le pays de Chanaan, est un pays d’Asie, aujourd’hui soumis à la Porte Ottomane ; il est sec, désert, entierement dépeuplé, & d’ailleurs couvert par-tout de rochers arides : sans doute qu’il étoit aussi cultivé qu’il peut l’être,quand les Juifs le possédoient. Ils avoient des palmiers, des oliviers, des ruches de miel ; ils avoient porté de la terre sur les rochers pour y planter des vignes, qui donnoient du bon vin ; cette terre liée avec des éclats de rocher, étoit soutenue par de petits murs. Cependant malgré tous les efforts des anciens Juifs, la Palestine n’eut jamais de quoi nourrir ses habitans ; de-là vint qu’ils se répandoient par-tout ; & alors, comme de nos jours, ils alloient faire le métier de courtiers en Asie & en Afrique ; à peine Alexandrie fut bâtie, qu’ils y étoient établis. Il y en avoit huit mille à Rome du tems d’Auguste.

 

L’état actuel de la Palestine est plus misérable que jamais : on n’y voit que des petites bourgades, villages dépeuplés, & quelques vieux châteaux délabrés. Le plat-pays est la proie des Arabes, qui le courent de toutes parts ; & comme il n’est cultivé & semé qu’en peu de lieux, ils attaquent le voyageur & les étrangers pour en tirer quelque chose. Les garnisons turques sont trop foibles & trop écartées les unes des autres pour réprimer ces brigandages.

 

Le peu de chrétiens qui se trouvent en Palestine, sont ramassés dans les vallées du Liban, sous leurs evêques maronites. Ils dépendent pour le temporel d’un seigneur arabe, qui se dit emir de Tripoli, & qui est tributaire du Turc. L’anti-Liban est habité par les Druses, gens qui ont une religion différente des Chrétiens, des Turcs, & de tous les autres peuples de la terre.

 

Toute la Palestine peut avoir 7 lieues d’étendue du midi au nord, sous les trois degrés paralleles 31. 32. & 33. Sa largeur peut être de 30 lieues.

 

Les pélerins la divisent en trois provinces ; la Judée, la Samarie & la Galilée, gouvernées chacune par un émir, sous le bon plaisir du grand-seigneur, qui, outre cet émir, y entretient deux sangiacs subordonnés au bacha de Damas.

 

Ces trois émirs sont l’émir de Seide, l’émir de Caesair & l’émir de Gaza ; les deux sangiacs prennent les noms de leur résidence, Jérusalem & Naplouse. Au-delà du Jourdain est ce qu’on appelle le royaume des Arabes ; ce royaume consiste en des déserts immenses, dont le roi est un souverain indépendant, qui ne reconnoît point l’autorité de la Porte.

 

Suivant le pere Nau, la Palestine comprend aujourd’hui le pays de Gaza, le pays d’Elkahill, ou d’Hébron, le pays d’Elkolds, ou de Jérusalem, le pays de Naplos, ou Naplouse, le pays de Harcté ; le pays de Jouret-Cafre-Kanna, ou de Nazareth, le pays de Sapheth, & enfin le pays au-dessus du Jourdain, où il est dangereux de voyager à cause des Arabes qui l’occupent. Il ajoute que ces divers pays forment autant de gouvernemens, dont cependant le nombre n’est point fixe, parce que le grand-seigneur partage quelquefois un gouvernement en deux, & quelquefois il en unit deux en un.

 

L’Encyclopédie, 1re éd., Tome 11, Auteur(s) : Jaucourt, Publication : 1751, Pages : 778-779