Voir aussi :

Stèle de Mesha : -850 (texte)
Stèle de Tel Dan : environ -900 -800 (texte commenté)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La stèle, visible au musée du Caire, a été découverte en 1896 par Flinder Petrie1 dans le temple funéraire du pharaon Merenptah (-1213 ;-1203) de la XIXe dynastie, à Thèbes.

La tombe du Pharaon a été découverte dans la vallée des rois par Richard Pockope en 1737.

La tombe du pharaon Merenptah, fils et successeur de Ramsès II, est l’un des plus grands et des plus beaux hypogées2 de la Vallée des Rois. Pillé dès la fin du Nouvel Empire, il attira l’attention des visiteurs dès l’Antiquité d’après les graffitis grecs qu’on y lit encore, puis fut peu à peu enseveli sous les masses d’alluvions charriés par les pluies torrentielles depuis le haut Moyen Âge... les savants de l’expédition d’Égypte purent le visiter et l’étudier. Entrepris au début du XXe siècle, le dégagement du monument n’a été mené à son terme qu’entre 2002 et 2008 par la mission archéologique du musée du Louvre… De nombreux fragments des sarcophages royaux et quelques vestiges du mobilier funéraire ont [...] été mis au jour. 3

 

Schéma d'un Hypogée

Le temple est situé sur le site de Louxor sur la rive ouest du Nil.

Cette stèle de granit gris, qui mesure 3,18 mètres de haut sur 1,61 mètre de large et 31 centimètres d'épaisseur, fut érigée initialement par Amenhotep III probablement dans son propre temple funéraire, situé non loin de celui de Mérenptah, treizième fils et successeur de Ramsès II. Il en utilisa le verso pour faire inscrire, à la date du troisième jour du troisième mois de chémou (l'été) de l'an 5 de son règne (soit vers -1210), un hymne à sa personne et commémorer sa campagne militaire victorieuse de l'an 5 en Libye et au pays de Canaan.

Gravée de droite à gauche, l'inscription glorifie tout d'abord le pouvoir du souverain, vainqueur des Tjehenou. Les différentes sources permettent de préciser que la victoire de Mérenptah est remportée sur une coalition des Libyens (Libou et Mâchaouachs) avec les Peuples de la mer (Akaouash, Toursha, Rouk, Shardanes et Shakalash). Le chant triomphal se poursuit par un hymne à la paix.

La stèle est particulièrement connue pour contenir, dans la strophe finale, la première mention supposée d'Israël (ou plutôt, des Israélites) hors contexte biblique, c'est également la seule mention d'Israël connue dans les textes égyptiens.

À la vingt-septième ligne, l'avant-dernière, parmi une liste des peuples de Canaan vaincus par Mérenptah, la stèle mentionne Ysr3r, qui est généralement interprété comme « Israël ». Bien que cette lecture soit la plus répandue, il existe parfois d'autres interprétations telles que « Jezréel ». Alors que le déterminatif associé aux trois noms précédents (Ashkelon , Gezer et Yenoam) désigne un territoire, celui associé à Israël suggère une population plutôt qu'un lieu géographique. La stèle n'indique ni la taille du groupe ni sa localisation exacte. Elle indique seulement qu'un groupe nommé « Israël » est présent en Canaan à cette époque « Israël est dévasté, sa semence n'est plus ».

 



L'inscription est constituée de hiéroglyphes à valeur phonétique que Flinders Petrie interprète comme israr et de hiéroglyphes à valeur déterminatives qui désignent des peuples (l'homme et la femme, les trois
 traits
 verticaux
 indiquant 
le 
pluriel) étrangers (le bâton de jet). Il s'agit manifestement d'un peuple cananéen qu'on identifie généralement aux proto-Israélites. Alors que les noms précédents reçoivent le déterminatif de ville étrangère (le bâton suivi de trois montagnes), Israël est suivi du bâton, suivi d'un homme et d'une femme assis. L'interprétation de ce déterminatif a été utilisée pour appuyer différentes théories sur l'origines des Israélites. Il peut signifier chez les Égyptiens un peuple nomade ou semi-nomade mais se retrouve pour d'autres peuples non nomades. Pour le moins, tout le monde s'accorde pour retenir un peuple sans une ville-état fixe.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’égyptien prt.f (graine, descendance, ou encore semence) pourrait signifier un peuple sédentaire (puisqu'on a détruit son grain) mais s'inscrit surtout dans un langage de propagande, la semence symbolique du blé peut rappeler la coutume chez les Égyptiens (mais aussi chez d’autres peuples) de détruire les champs de blés des territoires vaincus, ou encore la semence spermatique peut également évoquer la pratique égyptienne de couper les pénis des vaincus morts au combat afin de les décompter.

La stèle atteste de la présence d'un « Israël » en Caanan à la fin du XIIIe siècle av. J.-C.. Elle témoigne des vagues de populations qui s'installent dans les hautes terres de Canaan et en Transjordanie à cette époque. Israël n'est ensuite plus mentionné avant le IXe siècle av. J.-C. où il apparaît sur la stèle de Mesha.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Texte de la stèle

« Une grande joie est advenue en Égypte et la jubilation monte dans les villes du Pays bien-aimé. Elles parlent des victoires qu'a remportées Mérenptah sur le Tjehenou. Comme il est aimé, le prince victorieux ! Comme il est grand le roi, parmi les dieux ! Comme il est avisé, le maître du commandement !
Oh qu'il est doux de s'asseoir et de bavarder ! Oh ! Pouvoir marcher à grands pas sur le chemin sans qu'il n'y ait plus de crainte dans le cœur des hommes. Les forteresses sont abandonnées, les puits sont rouverts, accessibles désormais aux messagers ; les créneaux du rempart sont tranquilles et c'est seulement le soleil qui éveille les guetteurs.

Les gendarmes sont couchés et dorment. Les éclaireurs sont aux champs (marchant) selon leur désir.

Le bétail, dans la campagne, est laissé en libre pâture, sans berger, traversant (seul aussi) le flot de la rivière. Plus d'appel, plus de cri dans la nuit : "Halte ! Voyez, quelqu'un vient qui parle la langue d'autres hommes."

On marche en chantant, et l'on n'entend plus de cri de lamentation.

Les villes sont habitées de nouveau et celui qui laboure en vue de la moisson, c'est celui qui la mangera.
Rê s'est tourné vers l'Égypte, tandis qu'a été mis au monde, grâce au destin, son protecteur, le roi de Haute et de Basse-Égypte, Baenrê, le fils de Rê, Mérenptah.

Les chefs tombent en disant : Paix ! Pas un seul ne relève la tête parmi les Neuf Arcs.

Défait est le pays des Tjehenou.

Le Ḫatti est paisible.

Kana`an est dépouillé de tout ce qu'il avait de mauvais.

Ašqalon est emmené.

Gezer est saisie.

Yenoam (en) devient comme si elle n'avait jamais existé.

Isra'el est détruit, sa semence même n'est plus.

Hourrou (la Syrie) est devenue une veuve pour l'Égypte.

Tous les pays sont unis ; ils sont en paix.

 

(Chacun de) ceux qui erraient sont maintenant liés par le roi de Haute et Basse Égypte, Baenrê, le fils de Rê, Mérenptah, doué de vie, comme Rê, chaque jour. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

    Tombeau de Merenptah

 

1 Flinder Petrie (mort à Jérusalem en 1942), archéologue anglais est considéré comme l'un des pères de l’égyptologie moderne. Il est notamment l'inventeur de la stratigraphie, le relevé couche par couche effectué lors des fouilles. Il eut comme élève Howard Carter (en 1892), qui a découvert la tombe de Toutankhamon en 1922.

2 L'hypogée désigne construction souterraine, plus spécifiquement une tombe creusée dans le sol (sous-sol, flanc de colline)

3 Christophe Barbotin, conservateur du Musée du Louvre

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