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La Grande-Bretagne souhaite préserver la route des Indes et mettre à terre l'empire ottoman. Lors d'un échange de lettres entre le Haut Commissaire anglais au Caire, Henry de Mac Mahon et le Chérif (gardien des lieux saints) de la Mecque, les Anglais promettent l'indépendance aux Arabes. Ils demandent en échange un soulèvement arabe contre l'empire ottoman dont font partie les territoires convoités (futurs Syrie, Irak, Liban, Arabie).

 

Les termes sont parfois vagues, ce dont Hussein se plaint dans la lettre. Il est vrai que MacMahon n'a aucune intention de tenir les promesses qu'il pourrait être obligé d'écrire. Selon lui, un État arabe serait une absurdité car les Arabes ne forment qu'un ramassis de tribus éparpillées sans cohésion et sans organisation1. George-Picot en retire l'impression que les britanniques ne souhaitaient qu'une seule chose, abuser les Arabes.

Hussein écrit (lettre n°1) que la nation arabe sans aucune exception a pris ces dernières années la décision pour obtenir sa liberté, de saisir les rênes de sa destinée en théorie mais aussi en pratique;

Il demande que l'Angleterre reconnaisse l'indépendance de la Nation arabe (dont évidemment il prendra la tête) dans les limites suivantes :

- au nord par Mersine et Adana jusqu'au 37°degré de latitude, où se trouve Birijik, Urfa, Mardin, Midiat, Jezirat (Ibn 'Umar), Amadia, jusqu'à la frontière de la Perse;

- à l'est par les frontières de la Perse jusqu'au Golfe de Bassorah;

- au sud par l'océan Indien, à l'exception d'Aden qui doit rester tel qu'il est;

- à l'ouest par la mer Rouge, la mer Méditerranée jusqu'à Mersine.

et approuve la proclamation d'un Califat arabe de l'islam. La réponse anglaise est laconique (lettre n°2) :

" En ce qui concerne les questions de limites et des frontières, il semble prématuré de consacrer du temps à discuter de ces détails dans le feu de la guerre, alors que dans plusieurs portions du territoire concerné, l'occupation par les Turcs est maintenant effective;

et peu appréciée par Hussein qui dit l'impression qu'elle [lui ] a laissé d'une certaine ambiguïté et d'un ton hésitant et froid en ce qui concerne notre point essentiel.

Mac Mahon s'engage finalement sur les deux districts de Mersine et d'Alexandretta

" mais les parties de Syrie s'étendant à l'Ouest des districts de Damas, Homs, Hama et Alep ne peuvent pas être considérées comme étant purement arabes et seraient exclues des limites et frontières envisagées.

Cette phrase fera couler beaucoup d'encre car la Palestine, non mentionnée explicitement, est située à l'Ouest de la ligne Damas-Homs-Hama-Alep, et doit être exclue de l'empire arabe pour les Anglais.

 

Voir aussi le rapport fait en 1939 sur la correspondance MacMahon Hussein

(Anglais, 52 pages dont 9 pages de rapport + annexes)

 

Mais La Palestine est aussi au Sud de cette ligne,pas strictement à l'ouest, et doit donc être incluse dans leur futur territoire par les Arabes.

" Quant aux régions qui s’étendent à l’intérieur des frontières proposées, et dans lesquelles la Grande-Bretagne est libre d’agir sans porter atteinte aux intérêts de la France, son alliée, je suis autorisé à vous conférer les gages suivants au nom du gouvernement de la Grande-Bretagne, et en répondant comme suit à votre note :

que, sous réserve des modifications citées ci-dessus, la Grande-Bretagne est prête à reconnaître et à faire respecter l'indépendance des Arabes dans toutes la région délimitée par les frontières que propose le Chérif de La Mecque.

Cette lettre n°4 écrite par Mac-Mahon le 24 octobre 1915, a pour effet d’entraîner les Arabes dans la guerre aux côtés des Britanniques.

Alors que l'avenir se négociait entre les Européens et le chérif Hussein, en Syrie apparurent des mouvements nationalistes, dont le but était la libération du joug turc et l'établissement d'une "nation arabe" unifiée. Avant même la guerre, des comité virent le jour, mais dont le rayonnement était très limité.

En 1915, les comités rallièrent le projet de royaume arabe proposé par Hussein. Dès avant le début de la révolte, le pouvoir ottoman prit des mesures contre les nationalistes. Des contingents arabes furent mutés sur le front dû Caucase.

" Après accord avec les alliés, le 10 juin 1916, le chérif levait l'étendard de la révolte et se faisait proclamer "roi des Arabes", les alliés se contentant seulement de lui reconnaître le titre de "roi du Hedjaz". La tonalité de la proclamation d'Hussein reposait sur la religion musulmane et non sur les principes du nationalisme arabe balbutiant. Il était alors entendu que le royaume du Hedjaz, puissance belligérante à part entière, serait ultérieurement convié aux conférences de la paix en cas de victoire des alliés.

Mais, parallèlement, Français et Britanniques songeaient à remodeler le Moyen-Orient dans la perspective de l'après-guerre, et selon leurs seuls intérêts.

Les Français étaient surtout intéressés par le Liban où ils avaient de puissants soutiens parmi les maronites, tandis que les Britanniques avaient des vues sur l’Irak.2

1 James Barr – Une ligne dans le sable, le conflit franco-britannique qui façonna le Moyen-Orient, Perrin, 2017