Le terme colonialisme comprend deux acceptations qui parfois se complètent : le colonialisme étatique et le colonialisme de peuplement. Ceux qui considèrent que le sionisme représente une doctrine coloniale assimilent les deux.

Le colonialisme de peuplement : C’est le cas où une population allogène converge vers un territoire sans pouvoir politique pour s’y installer. On l’a vu aux Etats-Unis avec la marche vers l’Ouest au XIXe siècle par exemple.

Le colonialisme étatique : Il vise pour un pays à s’octroyer des droits sur un territoire qui ne lui appartient pas, dans l’optique d’en retirer un avantage stratégique et militaire et des richesses, par exemple de matières premières. L’Occident et l’Orient, ont été colonisateurs. L’empire français, l’empire britannique, dans une moindre mesure l’empire allemand ont colonisé des territoires en Afrique et Asie du Sud-Est notamment. La Chine occupe et colonise le Tibet par exemple. Les grands empires ont été légion.

Le colonisateur est donc d’un Etat qui envoie ses troupes pour prendre possession d’un territoire non intégré à son espace national, d’y accroitre sa souveraineté et l’exploiter économiquement.La population du colonisateur est souvent réduite, et l'armée du colonisateur comme le pouvoir local rend compte au pouvoir politique de la métropole.

 

Sur le territoire d’Israël : La création d’Israël n’entre pas dans ce schéma, Israël, est un Etat indépendant. Le pays a été créé par une horde de réfugiés des pogroms, des expulsions des pays arabes et de la Shoah, pas vraiment une armée coloniale. La Palestine avait un nom et des habitants (dont des arabes, des chrétiens, et des juifs), mais pas de pouvoir indépendant, excepté celui donné par la SDN et l’ONU à la Grande-Bretagne au nom de la communauté internationale. C’est cette dernière qui a permis la création d’Israël, et non pas un pays colonisateur qui aurait mis en place une administration politique, militaire et économique.

Youssef Diya Al-Khalidi, ancien maire de Jérusalem, écrit au grand rabbin de France Zadoc Khan en mars 1899. Cet opposant au sionisme écrit que "c’est « folie pure » que de vouloir bâtir un Etat juif souverain dans ce pays qui « fait partie intégrante de l’Empire ottoman et, ce qui est plus grave, est habité par d’autres que des Israélites", mais il reconnait cependant que " L'idée en elle-même n'est que toute naturelle, belle et juste. Qui peut contester les droits des Juifs sur la Palestine ? Mon Dieu, historiquement, c’est votre pays ! "

Albert Sarraut cite les pionniers juifs :

"Nous devons placer le travail au sommet de toutes nos aspirations ... Ce ne sera que lorsque nous aurons fait du travail pour lui— même notre idéal, ou mieux encore, lorsque nous aurons réalisé cet idéal que nous pourrons guérir de la lèpre dont nous sommes atteints , . .
 " C'est pour cela qu'il faut le dire tout simplement : tout notre désir au pays d'Israël est de faire réellement, de nos propres mains, toutes les choses qui font la vie ... de ressentir ce que ressent le travailleur „.. nous aurons alors une culture, nous aurons alors une vie."

C'est pour cela et pour bien d'autres raisons que les pionniers juifs ne sont pas des colonisateurs. Ils ne constituent pas les avant— postes d'une quelconque métropole européenne, ils. ont quitté la Russie sans espoir et sans possibilité de retour, contrairement aux colons français d'Afrique du Nord qui ont eux l'impression de servir "le prestige de la France" et d'être protégés par son armée. N'étant pas au service d'une métropole, ils ne bénéficient pas d'une législation agraire susceptible de les avantager : en effet, tandis que les colons français en Guyane par exemple, reçoivent des "concessions gratuites" de plusieurs dizaines d'hectares après que les Canaques qui les cultivaient en aient été expropriés, les pionniers juifs achètent leurs terres et les paient de plus en plus cher. Pour donner une idée de l'inflation constante du prix de ces lopins, il suffit de citer quelques chiffres : "le prix de ces terrains incultes évalué à moins d'une livre sous l'administration ottomane, passe à trois livres en 1925. Si par bonheur ces sols semblent se prêter à la culture après dépierrement , leur prix grimpe jusqu'à 6 livres par dounam" , II n'est donc pas question dans ces conditions que les pionniers juifs appliquent la célèbre formule du "pacte colonial" : "tout de la métropole, tout à la métropole, tout par la marine métropolitaine.

Etant données ces différences politiques essentielles, il ne se produit pas non plus, avec l'arrivée des pionniers juifs, l'habituel partage des tâches économiques entre une métropole qui tire de ses colonies toutes les matières premières nécessaires à son alimentation et à son industrie que son sol ne peut produire et (fournit) à ses colonies tous les objets manufacturés indispensables" et des colonies qui servent de "marché privilégié" à cette métropole.". (Albert Sarraut, la mise en valeur des colonies françaises, Payot-Paris)

 

Israël est le fruit d’une doctrine nationaliste, le sionisme. Comme l’État de Palestine pourrait l’être s’il voit le jour.

 

Sur Gaza : Pour mémoire, Israël est sorti de Gaza en 2005. Il n’y a donc ni résident, ni armée, ni pouvoir israélien à Gaza depuis cette date. Les choses changent en 2023 suite à l’attaque de 7/10. Pour la première fois l’armée Israélienne rentre à Gaza.

 

Sur Jérusalem-est  : Le statut de Jérusalem est complexe , d’abord Corpus separatum en 1947 après avoir appartenu à l’empire ottoman, puis annexée par la Jordanie qui s’en est saisi sans droit (et sans partage de l’Onu qui ne la visait pas). Jérusalem est perdue par la Jordanie suite au conflit qu’elle a déclenché face à Israël en 167. La ville est annexée par Israël, ce qui n’en fait pas une colonie car le pouvoir légitime, si l’on souhaite écarter Israël n’est pas vraiment défini, faute de référent pour la propriété antérieure (Jordanie, plan refusé, empire Ottomans disparu ?).

Quant à la revendication palestinienne sur Jérusalem, elle est relativement récente.

La charte de l’Olp de 1964, signée à Jérusalem en Jordanie, ne contient aucune revendication sur Jérusalem, ou à une capitale quelle qu’elle soit. La charte amendée de 1968 non plus. Il est vrai qu’à l’époque, l’Olp souhaite détruire Israël et récupérer toute la Palestine, en faisant ainsi face au sionisme « fanatique par nature, agressif, expansionniste et colonial dans ses buts.. Etant donné que la libération de la Palestine éliminera la présence sioniste et impérialiste et contribuera à l'instauration de la paix au Proche-Orient, le peuple palestinien compte sur l'appui de toutes les forces progressistes et pacifiques du monde et les invite toutes instamment, quelles que soient leurs affiliations et leurs croyances, à offrir aide et appui au peuple palestinien dans sa juste lutte pour la libération de sa patrie.  »

C’est lors de l’adoption d’une déclaration d’indépendance que le Conseil national palestinien, le 15 novembre 1988 revendique pour la première fois explicitement Jérusalem comme capitale : 

« Le Conseil national palestinien, au nom de Dieu et du peuple arabe palestinien, proclame l’établissement de l’État arabe de Palestine sur notre terre palestinienne, avec pour capitale Jérusalem Al-Qods Al-Sharif. … Pour la réalisation de cet objectif, le Conseil national palestinien affirme la nécessité de : .. 2. Assurer le retrait d’Israël de tous les Territoires arabes occupés en 1967, y compris la Jérusalem arabe. … 4. d’agir pour mettre les Territoires palestiniens occupés, y compris la Jérusalem arabe, sous la supervision des Nations unies durant une période limitée,

 

La Cisjordanie avec ses implantations doit être distinguée du territoire israélien internationalement reconnu. C’est le lieu d’une occupation militaire et des civils israéliens s’y s’installent avec pour beaucoup le consentement du gouvernement. Jusqu’aux accord d’Oslo de 1993, c’est l’administration militaire israélienne qui gérait ce territoire conquis sur la Jordanie en 1967. Des villes entières y sont créées comme Maalé Adumim par exemple non loin de Jérusalem.

Si la notion de territoire occupé donnera lieu à une explication, la définition de colonie est liée au statut de ce territoire, occupé ou disputé ? (cf. infra). Et les choses ne sont pas simples. Les israéliens appellent implantations ( Les accords d’Oslo signés par Arafat aussi d’ailleurs) ce que d’autres nomment colonies. La différence tient au pouvoir légitime, qui est ou serait spolié par ces villes juives.

Ces implantations sont controversées jusqu’en Israël.

Le volet économique est absent de cet éventuel colonialisme, les seules productions ne relevant pas de l’exploitation de la main d’oeuvre locale ou d’un vol de matière première. En d’autres termes, le départ des résidents israéliens ne rendrait aucune ressource ou revenu aux résidents arabes du territoire, comme ça a été le cas dans la totalité des colonies rendues à leur indépendance.