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Al-Aqsa, (Masjid Al-Quabli) est le troisième lieu saint de l'Islam sunnite, la mosquée lointaine que Mahomet évoque dans son voyage nocturne.

Les origines religieuses

Le Prophète Mahomet s'est rendu en rêve sur un sanctuaire éloigné comme le mentionne le premier verset de la 17e Sourate du Coran dite du  "Voyage Nocturne" :

« Gloire à celui qui a fait voyager de nuit son serviteur du sanctuaire sacré au Masjid1 très éloigné (signification d'Al-Aqsa) dont nous avons béni l'enceinte, et ceci pour lui montrer certains de nos Signes. Dieu est celui qui entend et qui voit parfaitement. »

 

Le "serviteur du sanctuaire sacré" est interprété comme étant Mahomet, le sanctuaire étant la Kaaba,  qui constituait déjà un but de pèlerinage avant l'Islam.

Le verset 17 date de la période Mecquoise de Mahomet, avant l'Hégire en 622 qui voit son départ vers Yatrib devenue Médine (de Médinat, la ville). A l'époque il n'y avait pas encore de Mosquées en Palestine, la première à être construite étant celle de Quba à côté de Médine, après l'Hégire.

(1) Masjid :Littéralement, Masjid, est issu de la racine Sa_ja_da en Arabe, qui signifie flexion. Le mot proviendrait de l'araméen Masged signifiant poser le front au sol. Le Masjid est donc l'endroit où l'on fléchit, on obéit, où l'on se prosterne. Par extension c'est la mosquée dans son sens actuel. Le mot mosquée ( apparu en Français en 1553) vient de là, par l'espagnol Mesquita puis l'italien Moschea.

C'est deux cents ans après la mort de Mahomet que son premier biographe , Ibn Hicham2 (mort en 834) reprenant une biographie antérieure disparue, due à Ibn ishaq3 (704 - 767), a identifié le temple mentionné dans ce verset comme étant Jérusalem.

(2) Ibn Hichâm (Abû Muḥammad `Abd al-Mâlik Ibn Hichâm) (???-vers 834) est un généalogiste et grammairien arabe né à Bassorah. Il a étudié les hadîths à Koufa en Irak puis il s'est installé en Égypte. Il est connu pour avoir remanié la première « biographie du prophète » Mahomet appelée sîra et écrite par Ibn Ishaq. Cette biographie est connue sous le nom de Biographie du messager de Dieu, Muhammad ben `Abd Allah ou La Biographie du prophète ou Biographie due à Ibn Hichâm.

(3) Abû `Abd Allah Muhammad ben Ishâq , Ibn Ishaq est un historien musulman arabe (Médine vers 704-Bagdad vers 767). Il est connu pour avoir rédigé la Sîrat Rasûl Allah, c'est-à-dire Biographie de l'Envoyé d'Allah, première biographie de Mahomet.

Depuis, Jérusalem est devenue une ville sacrée pour l'Islam. Le Coran ne cite pas Jérusalem et ne cite qu'une fois Médine et la Mecque. La mosquée lointaine, Al-Aqsa, a été identifiée comme celle construite entre 701 et 705 sur le Mont du Temple qui n'était pas encore l'Esplanade des Mosquées.

Mahomet a fait son voyage nocturne sur le dos d'un Buraq, la monture ailée des prophètes venue du paradis. Selon les sources postérieures au Coran, les Hadiths (paroles rapportées du prophète) notamment, il a accroché Buraq à la muraille (le Kotel actuel) avant de rencontrer les prophètes qui l'ont précédé, Abraham, Moïse et Jésus et de diriger leur prière. Il est ensuite monté au ciel par une échelle en compagnie de l'ange Djibril (Gabriel ) pour rencontrer Allah et y discuter du nombre de prières quotidiennes. Le voyage nocturne est le Isra, tandis que l'ascension est nommée Miraj.


Jérusalem est une ville qui a joué un rôle pour Mahomet, même si à l'exception de son ‘voyage nocturne’ il n'y est jamais allé. Des tribus juives préexistaient dans la péninsule arabique et Mahomet cherchait à les rallier, après avoir été chassé de la Mecque. Ce serait pour cela qu'il aurait donné comme d'abord Jérusalem comme direction de la prière (Qibla). Mais les tribus juives ne le reconnaissant pas comme prophète, il les affronte, les pousse vers l'exil et les massacre. Il change aussi la direction de la prière qui depuis se tourne vers La Mecque. L'importance donnée postérieurement à Jérusalem a pu aussi être politique, afin de lutter contre le pouvoir des Omeyades à Damas qui s'étendait vers le sud de la Syrie.

Les tribus de Médine : Yathrib (Médine) et ses environs était peuplé principalement de cinq tribus dont trois juives: Les Banu Qaynuqa, les Banu Nadir et les Banu Qurayza. Banu signifie les ‘fils de’

Les trois principales tribus juives qui apparaissent un peu partout dans les sources islamiques sont attestées dans des sources indépendantes de la tradition islamique et dans la tradition poétique juive. Toutes ces tribus sont constituées de clans.

 

L'édifice

Al-Aqsa est la plus grande mosquée de Jérusalem. Elle est considérée par l'Islam Sunnite, le courant majoritaire, comme le troisième lieu saint de l'Islam. Pour les Chiites, c'est le site de Nadja (Irak), suivi de Kerbala (Irak) et Mashlad (Iran). Le site de la mosquée, au sud de l'esplanade est sans doute l'extension ajoutée par Hérode lors de la rénovation et l'agrandissement du Temple. L'esplanade est alors négligée voire abandonnée.

Des fouilles entreprises par l'archéologue anglais Robert William Hamilton entre 1938 et 1942 (période du mandat britannique) ont mis à jour un Mikvé, bain rituel juif, datant de l'époque du second temple et des mosaïques byzantines provenant d'une église sous la construction actuelle.

La construction d'Al-Aqsa a été  entamée en 701 par Omar, et achevée par son fils Al-Walid, qui lui succède en 705. Un lieu de prière, rectangulaire, "construit à l'aide de grandes poutres" et "reposant sur quelques restes de ruines " est décrit vers 680 par l'évêque Arculfe. Cet édifice initial peut selon lui accueillir 3 000 hommes. La mosquée est abîmée par le tremblement de terre de 754, puis celui de 780.

En 822 est ajouté le portique, mais la mosquée est de nouveau partiellement détruite par le tremblement de terre de 1034 et reconstruite par le septième calife fatimide, Ali Az-Zahir. C'est la mosquée actuelle.Ali Az-Zahir est le fil du calife disparu que vénèrent les Druzes.

"La mosquée al-Aqsa est une construction rectangulaire édifiée à l'intérieur du Haram al-Charif sur une plate-forme qui compense la pente nord-sud du site du Haram. Le plan actuel est l'aboutissement de diverses reconstructions et modifications au cours du temps, et qui font encore débat parmi les historiens et les chercheurs.

Les premières étapes de la construction remontent au calife Omar bin al-Khattab ( 634- 644) qui éleva un mihrab et une petite mosquée sur le site de l'édifice actuel. .. Le calife Omar prit plusieurs avis sur la position idéale de la mosquée et reçut le conseil de la construire au nord du rocher, ce qu'il refusa en disant : “Mais c'est sa façade qui doit servir de qibla,… Vers 49-50 H / 670 J.-C., le voyageur Arculfe nota que la mosquée se trouvait dans la partie méridionale du Haram, érigée sur de grands piliers de bois et à l'aide de matériaux récupérés dans les environs, et qu'elle avait été agrandie jusqu'à pouvoir recevoir 3 000 fidèles. Rien ne reste de ce bâtiment d'origine appelé masjid al-'Oumari qui fut rénové au début de 685.

La mosquée al-Aqsa fut construite sous le règne d'Abd al-Malik. Elle compte 15 arcades qui ont souffert d'un certain nombre de tremblements de terre et ont été restaurées à plusieurs reprises.

Aucune n'a été intégralement préservée, à l'exception de celles du mur sud.

Sous les Croisés, la mosquée fut transformée en église. Un important retrait, qui existe encore, fut aménagé sur le côté est correspondant au plan des églises qui ouvrent vers l'Orient.

La mosquée actuelle possède neuf entrées, dont sept sont situées dans le mur nord, l'une dans le mur ouest et la dernière à l'est. Le mur nord est doublé par une colonnade composée de sept piliers de pierre soutenant des voûtes entrecroisées. Elle donne sur la place du Haram al-Charif par une importante ouverture sous un vaste arc brisé.

Le plan au sol de la mosquée mesure 50 x 80 m. Il comprend sept nefs orientées nord-sud, la centrale étant la plus large et la plus haute. Les trois colonnades ouest sont soutenues par d'importants piliers, celles de l'est par une succession de colonnes de marbre importées d'Italie lors de la restauration de cette partie par le Haut Conseil islamique dans la première moitié du XXe siècle. à l'extrémité sud de la nef centrale s'élève une coupole hémisphérique en bois soutenue par des trompes. Au-dessous se dresse un superbe mihrab édifié sur l'ordre de Salah al-Din Ayyoubi (Saladin) lorsqu'il libéra la mosquée de l'occupation croisée en 1187 (détruite en 1969 et reconstruit depuis) »1

Les croisés conquièrent la ville en 1099. Ils identifient alors la mosquée comme étant le Temple de Salomon. Le roi de Jérusalem, Baudouin II (enterré au Saint-Sépulcre)  en fait son palais. À partir  de 1119, Baudoin s’installe à la Citadelle et les croisés le palais comme quartier général des « pauvres chevaliers du Christ et du temple de Salomon », devenu « ordre du Temple » (Le nom templier vient de là). Ils agrandissent l’édifice sans pour autant changer radicalement la structure. En 1170, Al-Aqa est décrite ainsi par le voyageur Jean de Wizburg :


Entre les murs de Jérusalem et la porte Dorée, se trouve le Temple. Il y a là un espace plus d'un grand trait de flèche en longueur, et large d'un jet de pierre, et là on arrive au Temple. Ce terrain est pavé, d'où lui vient son nom. À gauche, en hissant de ce portail, se trouve le Temple de Salomon où demeuraient les Templiers. » Selon Wizburg, c’est une véritable ville. Les bâtiments sont composés de: une écurie souterraine, si grande qu'elle pouvait « loger plus de deux mille chevaux ou mille cinq cents chameaux » , beaucoup de bâtiments « larges et amples » , « une nouvelle et magnifique église » aux toits pentus, dédiée à la Vierge et appelée « Sainte-Marie-Lateran », Le réfectoire des templiers. Entre le réfectoire et l'église se trouvaient les dortoirs des frères chevaliers, donnant sur un couloir. Les dortoirs des frères sergents se trouvaient à part. Chaque frère disposait d'une chaise, d'un coffre appelé huche, d'un lit, d'une paillasse (matelas empli de paille), d'un traversin, d'un drap et d'une couverture. Comme dans tout monastère, la proximité avec l'église permettait aux frères de se rendre à l'office de matines entre minuit et trois heures du matin. Il y avait aussi une salle du chapitre, une infirmerie, des appartemens pour les dignitaires, une maréchaussé et une forge dans laquelle étaient fabriqués le matériel militaire mais aussi la ferrerie pour les chevaux, les pièces métalliques destinées aux selles et brides, ainsi que la bourrellerie, une draperie, des cuisines, celliers à vin et fours de boulangerie, des porcheries, poulaillers, et jardins potagers, des silos à blé et à fourrage et des citernes

À la même époque, le Dôme du Rocher était considéré comme le Templum Domini (le temple du Seigneur).

L’aspect actuel d’Al-Aqsa est dû à Saladin qui effectue les dernières modifications en 1218, juste après la conquête de Jérusalem.

L'édifice est composé d'une série de deux triples rangées de colonnes parallèles encadrant une nef centrale surmontée d'un dôme.

Comme toute mosquée, l'intérieur comporte un Mihrâb et à sa droite un Minbar.

Le Mihrâb est une niche architecturale, souvent décorée de deux colonnes jointes par un arc, qui dans une mosquée indique la Qibla, la direction de la Mecque et donc de la prière.

Le Minbar est une chaire à degrés, placée à droite du mihrâb, du haut de laquelle l'imam prononce son prêche lors de la prière solennelle du vendredi.  

Saladin en 1187 fait réaliser à Alep un Minbar pour le Mihrâb. Il mesurait 4,5 mètres de large et 6 mètres de haut, était constitué de 16 000 pièces de bois précieux sculptées s’imbriquant les unes dans les autres, formant un ensemble homogène tenant sans colle ni clous. Le Minbar d'Al-Aqsa a été détruit en 1969 lors de l'incendie initié par un berger australien chrétien probablement fou.

Une reproduction de la chaire a depuis été réalisée sous l'égide du roi de Jordanie Hussein II (gardien des lieux saints) et achevée après quatre années de conception.

Les tremblements de terre de 1938 et 1937 ont encore endommagé l'édifice qui a été restauré. Benito Mussolini a donné les colonnes de marbres qui ornent l'intérieur.

Le plafond, orné de bois sculptés, est un reste d'un ensemble plus vaste datant des Oméyades.

Actuellement

Al-Aqsa est un enjeu religieux et politique majeur. Les musulmans accusent les Israéliens de vouloir  de faire des fouilles pour déstabiliser l'édifice. Les Israéliens accusent le Waqf, la fondation religieuse qui gère l'esplanade, de refuser toute étude afin de dissimuler le passé juif de la ville. L'incendie de  1969 avait failli mettre la région à feu et à sang. La Mosquée Al-Aqsa garde aujourd'hui encore son pouvoir explosif.

 

 

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