• Un écran placé devant le mur des lamentations suffit à déclencher une émeute. Le passage devant le mur est étroit, et c'est une violation du statu quo sur les lieux saints. Il faut dire qu'une simple chaise laissée en place peut être une revendication de propriété. Le document suivant est le rapport fait par les anglais sur l'incident.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Texte intégral

 

Le Mur occidental ou mur des lamentations à Jérusalem
Mémorandum de l'Etat au Secrétaire d'Etat aux Colonies

 

 

 

Présenté par le secrétaire d'État aux Colonies au Parlement par ordre de Sa Majesté, novembre 1928.

LONDRES :
IMPRIMÉ ET PUBLIÉ PAR LE BUREAU DE PAPETERIE DE SA MAJESTÉ.
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1928

Les incidents qui ont donné lieu aux plaintes et aux questions juives au Parlement sont décrits dans le communiqué suivant, publié par le gouvernement palestinien le 26 septembre dernier : -

" Dans la soirée du 23 septembre, la veille du Jour des Expiations, le Mutawali du Waqf d'Abou Madian a déposé une plainte auprès du Commissaire adjoint du District, Jérusalem, dans laquelle le trottoir et toute la zone autour du Mur occidental ou Mur des Lamentations est investi, qu'un écran de séparation avait été fixé sur le trottoir adjacent au mur et que d'autres innovations avaient été apportées dans la pratique établie, telles que l'introduction de lampes à essence supplémentaires, d'un certain nombre de tapis et d'un tabernacle ou d'une arche beaucoup plus grand que d'habitude. Le sous-commissaire de district s'est rendu au mur pendant le service du soir et, conformément à la pratique établie par le gouvernement, il a décidé que l'écran devrait être enlevé avant le service le lendemain. Il donna des instructions en conséquence au chandelier chargé des dispositions pour la conduite des services au Mur, réservant sa décision en ce qui concerne les lampes, les tapis et l'arche. Le bedeau s'est engagé à enlever l'écran et le sous-commissaire de district lui a donné jusqu'à tôt le lendemain matin pour le faire. Le sous-commissaire de district a accepté l'assurance donnée par le collet que ses instructions seraient suivies, tout en informant l'officier de police britannique de service qu'en cas de non-respect de son engagement, le collet devait être enlevé.

Le lendemain matin, le policier a visité le mur et, constatant que l'écran n'avait pas été enlevé, a demandé aux membres de la congrégation présents de l'emporter ; ils ont répondu qu'ils ne pouvaient le déplacer en raison de la sainteté de la journée. La police a donc retiré l'écran elle-même.

 

Les fidèles en général, ignorant les circonstances qui les avaient précédés et ne voyant que la police en train d'enlever l'écran qui avait été utilisé pour séparer les hommes et les femmes, s'excitèrent et certains d'entre eux essayèrent par la force d'empêcher que l'écran leur soit enlevé. En fin de compte, l'écran a été retiré.


L'importation de l'écran et sa fixation sur la chaussée constituaient une infraction au statu quo, ce que le Gouvernement n'a pas été en mesure de permettre. Dans le même temps, le gouvernement déplore profondément le choc qui a été causé à un grand nombre de religieux en ce jour si saint pour les Juifs. Le Gouvernement comprend que les autorités juives se sont occupées de l'innovation à l'origine de l'incident et, de leur côté, ont fait comprendre aux autorités juives qu'il était nécessaire, dans le cadre des incidents survenus au mur en 1922 et 1925 et à cette occasion, de consulter au préalable les fonctionnaires compétents du Gouvernement au sujet des dispositions à prendre concernant les services au mur les principales fêtes juives.

Aucun officier de police juif n'était présent au Mur à l'occasion en question parce que tous les officiers juifs à Jérusalem avaient été excusés pour le Jour des Expiations. Toutefois, le gouvernement étudiera l'opportunité d'inclure à l'avenir un officier juif responsable parmi les officiers affectés au Mur les jours saints solennels de la vie juive.

En conclusion, le Gouvernement considère que le retrait de l'écran était nécessaire, mais regrette toutes les circonstances qui ont entouré ce retrait".
On verra que l'intervention de la police a été causée par un acte des autorités juives, considéré par le gouvernement palestinien comme une infraction au statu quo.

Avant de passer à l'explication du statu quo tel qu'il apparaît au gouvernement palestinien et au gouvernement de Sa Majesté, il est nécessaire d'exposer brièvement la position telle qu'elle existait avant la mise en place de l'administration britannique en Palestine.

Le Mur occidental, ou Mur des Lamentations, faisait partie de l'extérieur occidental de l'ancien Temple Juif ; en tant que tel, il est saint pour la communauté juive, et sa coutume de prier à cet endroit remonte au Moyen Âge et peut-être plus loin.

Le Mur fait également partie du Haram-aI-Sharif ; en tant que tel, il est saint pour les musulmans.

 

De plus, il est légalement la propriété absolue de la communauté musulmane, et la bande de trottoir qui lui fait face est propriété du Waqf, comme le montrent les documents conservés par le Gardien du Waqf.

La communauté juive a établi un droit incontestable d'accès au trottoir pour les besoins de ses dévotions, mais chaque fois que les autorités musulmanes ont protesté, les autorités turques ont décidé à plusieurs reprises qu'elles ne permettraient pas que l'on s'écarte de la pratique actuelle, par exemple en apportant des chaises et des bancs sur le trottoir. Il est entendu qu'une décision interdisant l'installation d'écrans sur le trottoir a été rendue en 1912.

Le Gouvernement palestinien et le Gouvernement de Sa Majesté, ayant à l'esprit les termes de l'article 13 du Mandat pour la Palestine, ont estimé qu'il s'agit d'une question dans laquelle ils sont tenus de maintenir le statu quo, qu'ils ont considéré, en termes généraux, comme un droit d'accès de la communauté juive à la chaussée pour ses dévotions, mais ne peuvent apporter au mur que les accessoires du culte qui étaient autorisés sous le régime turc. Chaque fois que les autorités musulmanes ont préféré se plaindre que des innovations ont été apportées dans la pratique établie et que le Gouvernement palestinien, après enquête, s'est assuré que les plaintes étaient fondées, elles ont estimé qu'il était de leur devoir d'insister pour que les écarts par rapport à la pratique qui avait donné lieu à ces plaintes soient abandonnés.

Un incident qui s'est produit en septembre 1925, lorsque les autorités palestiniennes ont dû retirer des sièges et des bancs apportés au Mur, a fait l'objet d'un mémorandum adressé par le Président de l'Organisation sioniste à la Société des Nations en mai 1926 par l'intermédiaire du gouvernement de Sa Majesté. La Commission des mandats permanents et le Conseil de la Ligue ont tous deux conclu qu'une solution aux difficultés ne pouvait être trouvée que par voie d'accord, souscrivant ainsi au commentaire du Gouvernement de Sa Majesté sur le mémorandum, à savoir que le différend ne pouvait être réglé que par consentement mutuel. Le Gouvernement palestinien, bien qu'il soit prêt, s'il est approché par les deux parties, à servir d'intermédiaire, estime qu'il s'agit d'une question qui peut être réglée par consentement entre les communautés concernées. En fait, aucune des parties n'a pris contact avec le Gouvernement palestinien et celui-ci n'a connaissance d'aucune négociation engagée entre les parties.

D'après le communiqué officiel publié par le Gouvernement palestinien, il ressort - et, pour autant que le Gouvernement de Sa Majesté le sache, le fait n'est pas contesté - que les dernières innovations ont été apportées à la pratique existante lors du Jour des Expiations juives en septembre. Des plaintes concernant ces innovations ont été déposées auprès d'un fonctionnaire du Gouvernement palestinien par le Mutawali du Waqf auquel le trottoir est dévolu et, lorsqu'il a constaté, après enquête, que ces plaintes étaient fondées, il a dû choisir entre ignorer l'obligation mandataire de son gouvernement de maintenir le statu quo et supprimer une annexe du culte juif. Ayant décidé que l'obligation impérative ne pouvait être ignorée, il a obtenu du fonctionnaire juif présent au Mur qu'il s'engage à ce que l'écran qui avait été installé en violation de la pratique établie soit retiré avant le service le Jour des Expiations. Malheureusement, cet engagement n'a pas été respecté et, par conséquent, il n'y avait pas d'autre solution, compte tenu de l'obligation de maintenir le statu quo, que le retrait de l'écran lorsque, le lendemain matin, les fidèles présents au Mur eux-mêmes ont refusé de le retirer. Bien qu'une partie de la congrégation se soit efforcée de l'empêcher, l'enlèvement s'est en fait déroulé sans aucune perte, sauf une perte légère. Il fut un temps où il était d'usage de poster un inspecteur de police juif près du Mur des Lamentations pour les jours saints juifs, mais, à la demande urgente du Grand Rabbinat, tous les officiers de police juifs avaient été excusés le jour de l'Expiation, A l'avenir, des mesures seront prises pour s'assurer qu'un officier juif soit présent au Mur en toutes ces occasions.

Il a été instamment demandé que le gouvernement palestinien fasse preuve d'un plus grand discernement et, en particulier, qu'il consulte les autorités juives représentatives avant de prendre des mesures.

Le Gouvernement de Sa Majesté estime que la délicatesse de la question de la procédure au Mur et la nécessité d'une extrême discrétion à l'égard de tout ce qui pourrait être considéré par des voisins vigilants comme une violation du statu quo auraient dû être évidentes pour les autorités juives responsables. Ces autorités sont pleinement conscientes qu'en l'absence de tout accord mutuel entre elles et les autorités musulmanes régissant la conduite des services au Mur, les autorités musulmanes ont la possibilité de s'opposer à toute innovation dans la pratique, et qu'il est du devoir du Gouvernement palestinien de veiller à ce qu'il n'y ait aucune infraction au status quo.

Si les innovations introduites à l'occasion du Jour des Expiations juives ont été faites avec l'assentiment des autorités juives responsables, cet assentiment doit être présumé avoir été donné en sachant pertinemment que, puisque l'autorisation du Gouvernement et des propriétaires musulmans du trottoir n'avait pas été obtenue, il faudrait que le Gouvernement arrête de déroger au statu quo si une plainte était déposée.

Les autorités juives auraient dû être d'autant plus attentives à la possibilité que les autorités musulmanes se plaignent de toute dérogation au statu quo le jour du Grand Pardon juif, puisqu'une telle plainte a en fait été déposée le même jour en 1925 et que, après l'intervention de la police pour rétablir le statu quo, il avait été clairement indiqué aux personnes concernées que le Gouvernement palestinien considérerait comme leur devoir de prendre une mesure similaire en cas de récurrence.

Si, en revanche, les autorités juives responsables n'étaient pas au courant des innovations introduites lors de la fête juive du pardon, elles ne peuvent raisonnablement attendre de l'Administration Mandataire qu'elle accepte l'acte non autorisé d'un subordonné. En tout état de cause, le fonctionnaire responsable du Gouvernement palestinien a été confronté à une position appelant une décision immédiate et les principes sur lesquels il a agi ne peuvent, de l'avis du Gouvernement de Sa Majesté, être mis en cause. À la lumière des événements ultérieurs, il peut sembler malheureux que le commissaire de district adjoint se soit appuyé sur l'engagement pris par le fonctionnaire juif présent au mur de retirer l'écran, mais il n'avait aucune raison de supposer que cet engagement ne serait pas tenu en fait.

Il a été dit que la suppression de l'écran aurait dû être reportée jusqu'à la conclusion des services et le jeûne du Jour des Expiations. Il convient de préciser en réponse qu'il est d'usage de prendre des mesures immédiates lorsqu'il est établi que le statu quo a été violé. Dans l'Église du Saint-Sépulcre et dans d'autres Lieux Saints, même dans les services les plus sacrés et les jours les plus saints, l'infraction au statu quo a toujours été traitée immédiatement et sur-le-champ en raison du risque de créer un précédent qui ferait d'une infraction une partie intégrante du statu quo.

Il a été demandé de préférence au Gouvernement de Sa Majesté d'user de ses bons offices "pour promouvoir un arrangement éliminant les obstacles actuels au libre exercice du culte" au Mur des Lamentations.

Le Gouvernement de Sa Majesté considère qu'il est de son devoir, et c'est son intention, de maintenir le droit d'accès des Juifs au trottoir devant le mur pour leurs dévotions, ainsi que leur droit d'apporter au mur les accessoires qu'ils étaient autorisés à prendre au mur sous le régime turc. Il serait incompatible avec leur devoir en vertu du mandat s'ils s'efforçaient d'obliger les propriétaires musulmans du trottoir à accorder tout autre privilège ou droit à la communauté juive. La possibilité que de tels privilèges ou droits puissent être acquis par les Juifs par accord mutuel avec les autorités musulmanes a été réduite par le fait que l'opinion publique palestinienne a définitivement retiré la question de l'orbite purement religieuse et en a fait une question politique et raciale. Même si le différend n'avait pas revêtu ce caractère, il aurait été difficile de trouver une solution satisfaisante pour toutes les parties concernées. Dans l'état actuel des sentiments, la difficulté a été grandement augmentée. Néanmoins, dans l'espoir que des conseils plus sobres finissent par l'emporter, le Gouvernement palestinien a suggéré à la fois à l'Exécutif sioniste palestinien et au Conseil suprême musulman qu'il serait utile pour toutes les parties concernées qu'un protocole soit conclu entre les autorités musulmanes et juives réglementant la conduite des services au mur sans préjudice des droits légaux ou des propriétaires musulmans et de manière à satisfaire les exigences et coutumes liturgiques normales en matière d'exercice public de la religion.

Le gouvernement a également chargé un cadre supérieur de sonder les deux parties de façon provisoire, afin de déterminer si un tel arrangement peut être conclu. Si des assurances satisfaisantes sont reçues sur ce point, le Gouvernement palestinien sera tout à fait disposé et désireux d'user de ses bons offices pour faciliter un tel arrangement. Le Gouvernement de Sa Majesté, pour sa part, accueillerait favorablement tout arrangement qui, tout en leur permettant de s'acquitter de leur obligation mandataire de préserver tous les droits existants en rapport avec le mur des lamentations, permettrait de trouver une solution satisfaisante pour les deux parties concernées et d'éviter que des incidents aussi malheureux que celui de septembre dernier se reproduisent.

COLONIAL, BUREAU,

19 novembre 1928.

(3306-1) Wt,17386-2142 875 11/28 P. St. G. 3

 

Voir aussi :

le document original en anglais

- le texte intégral en anglais et français

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