Dans une lettre adressée à Emmanuel Macron en date du 17 août, Benjamin Netanyahou s'est dit «préoccupé par la montée alarmante de l'antisémitisme en France et par le manque d'actions décisives du gouvernement pour y faire face».

Le 19 août, la présidence française avait déjà dénoncé comme «erronée, abjecte» l'accusation de Benjamin Netanyahou, affirmant qu'Emmanuel Macron en avait pris connaissance par voie de presse et y répondrait par courrier.

(cf Le monde)

Les relations entre la France et Israël sont tendues

Cela fait suite à l'annonce de la reconnaissance de la Palestine par Macron, mais aussi suite à des propos peu amènes envers la communauté juive de France.

Le Président qui reproche notamment aux juifs français d'avoir oublié leur universalisme.

Pour Macron la reconnaissance de l'Etat de Palestine est un facteur de paix.  Pour ceux qui s'y opposent, c'est la reconnaissance du bien fondé du pogrom du 7 octobre 2027 par le Hamas et un encouragement à  recommencer, comme l'annonce régulièrement les dirigeants encore en vie du mouvement terroriste.

Le 17 aout, par une lettre sèche, le Président Macron répond pas voie de presse ( Journal Le Monde) au premier ministre israélien :

 

« Cher Monsieur le premier ministre,

J’ai bien reçu votre lettre du 17 août que vous avez décidé de rendre publique avant même que je ne la reçoive. C’est pourquoi ma réponse, par parallélisme, sera elle aussi rendue publique pour la clarté de nos débats mais pour ma part je tenais à vous le faire savoir et j’attendrai que vous en ayez pris connaissance, c’est là l’élémentaire courtoisie.

 La lutte contre l’antisémitisme ne saurait être un sujet d’instrumentalisation et ne peut nourrir aucun désaccord entre Israël et la France.

Au titre des premières actions menées après mon élection, j’ai tenu, dans l’enceinte tragique du Vel’ d’Hiv [la cérémonie s’est déroulée place des Martyrs-Juifs-du-Vélodrome-d’Hiver (15e arrondissement de Paris)], le 16 juillet 2017, à solennellement endosser – et vous aviez souhaité ce jour-là être à mes côtés – la définition de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) qui condamne l’antisionisme comme un antisémitisme. C’était la première fois qu’un président de la République français allait aussi loin et je l’assume parfaitement. La protection de nos compatriotes juifs contre la montée de l’antisémitisme est, depuis le premier jour, une priorité absolue de mon action. Cette responsabilité incombe à la France, et la totalité des services de l’Etat y est engagée. Elle ne saurait faire l’objet d’aucune manipulation dans un moment où nous faisons face à l’instrumentalisation d’un conflit qui n’appartient pas à la France mais pèse sur sa cohésion nationale et la sécurité de nos concitoyens.

Alors que j’ai promulgué le 31 juillet dernier la loi proposée par le Sénat relative à la lutte contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur, que nous avons tenu de février à avril les assises de lutte contre l’antisémitisme, que la France a consacré 15 000 policiers à la protection des lieux de réunion de la communauté après le 7-Octobre et que policiers et volontaires se sont mobilisés pour la sécurité des athlètes et touristes israéliens lors des Jeux olympiques et paralympiques de l’été dernier, ces accusations d’inaction face à un fléau que nous combattons de toutes nos forces sont inacceptables et offensent la France tout entière.

L’histoire nous enseigne que là où tente de s’ancrer l’antisémitisme, prospèrent avec lui toutes les formes de racisme et de haine. C’est au nom de cette leçon que la République française est l’inlassable ennemie de l’antisémitisme depuis la Révolution de 1789. En conséquence, nul ne peut douter, s’il est de bonne foi, que je demeure et demeurerai garant de l’impérieuse nécessité de combattre cette abomination, partout et toujours. Et ce serait une faute d’expliquer, voire de justifier, l’antisémitisme en France par les décisions que j’ai pu prendre. Les antisémitismes de notre pays viennent de loin, ont longtemps été nourris par l’extrême droite, sont aujourd’hui aussi alimentés par l’extrême gauche qui essentialise la communauté juive et soutient la haine contre cette dernière. Tout antisémitisme est une trahison de la République et de son universalisme.

Mais la définition de l’IHRA ne saurait dédouaner Israël des politiques qu’elle mène aujourd’hui à Gaza et dans le reste des territoires palestiniens. Nous avons de graves désaccords, mais, fidèle en cela à l’amitié qui lie la France et le peuple d’Israël, j’ai tenu à maintenir le dialogue le plus étroit avec vous, un dialogue fondé sur notre attachement indéfectible au droit d’Israël à l’existence et à la sécurité.

Notre détermination à ce que le peuple palestinien dispose d’un Etat est ancrée dans notre conviction qu’une paix durable est essentielle à la sécurité de l’Etat d’Israël, à sa pleine intégration régionale dans un Moyen-Orient enfin en paix, à une logique de normalisation que nous soutenons et qui doit pouvoir être menée à son terme au plus vite. Cette paix durable passera par la création d’un Etat palestinien souverain, reconnaissant Israël et son droit à la sécurité, démilitarisé, vivant dans la paix à vos côtés.

En aucun cas, cette double conviction ne reflète une quelconque complaisance permettant au Hamas ou à d’autres groupes terroristes d’utiliser un tel Etat pour menacer votre pays à l’avenir. L’Etat palestinien doit constituer la fin du Hamas. Nous sommes convaincus, après près de deux ans d’opérations israéliennes à Gaza, que c’est aujourd’hui la seule manière d’éradiquer réellement le Hamas et d’éviter à la jeunesse israélienne de se consumer dans une guerre permanente, dévastatrice pour les Palestiniens de Gaza, mais également pour Israël et la région tout entière.

Pour y parvenir, nous avons, avec l’Arabie saoudite, rassemblé à New York les 28 et 29 juillet dernier de très nombreux gouvernements arabes, occidentaux et autres, qui ont marqué leur disponibilité à s’impliquer dans une stratégie pour le jour d’après, y compris à assumer des responsabilités de sécurité transitoires dans la bande de Gaza dans le cadre d’une mission de stabilisation, à soutenir et contribuer au désarmement des groupes terroristes à commencer par le Hamas, à aider à renouveler une gouvernance palestinienne viable, libérée de l’emprise du Hamas, et à reconstruire un territoire aujourd’hui dévasté.

Cet engagement est inédit. Il résulte de notre indignation face à un désastre humanitaire épouvantable à Gaza que rien ne saurait justifier. Il découle également de la conviction qu’un exode massif de Gazaouis poussés par la famine et la violence, outre l’indignité morale qu’elle constitue, aura des effets directs et durables sur la sécurité régionale et internationale, y compris sur celle d’Israël et de l’Europe. Il résulte surtout d’une volonté collective inédite de voir advenir une paix durable dans un Moyen-Orient où Israël a largement contribué ces deux dernières années à réduire une autre menace, celle de l’Iran.

Cette disponibilité à contribuer à l’après-guerre à Gaza s’accompagne de la résolution d’avancer de la même manière vis-à-vis du reste des territoires palestiniens occupés et de les transformer en un Etat séparé, démilitarisé et réformé qui vivra en paix à vos côtés. Un Etat palestinien où la haine de l’autre n’aura pas de place, qu’il s’agisse de l’enseignement et des autres politiques menées. Nous sommes prêts à être collectivement comptables des engagements pris à New York ainsi que par le président Abbas dans sa lettre du 9 juin 2025.

Ce chemin est difficile, mais il donne à Israël une main puissante et nouvelle sur son avenir : une normalisation étendue à l’échelle du monde musulman ; la fin du conflit permanent qui a affecté votre peuple avant et depuis la fondation de l’Etat d’Israël ; la fin d’une grave dégradation de l’image morale d’Israël, qui est devenue le prétexte et le moteur d’un nouvel antisémitisme que nous devons combattre mondialement.

Cet engagement est inédit et je vous appelle à ne pas l’écarter d’un revers de la main, au nom de notre amitié avec le peuple d’Israël.

Monsieur le premier ministre,

Aujourd’hui, votre gouvernement a décidé d’une nouvelle phase de l’offensive menant à la réoccupation de Gaza. J’ai la conviction, et je la partage avec ces nombreux partenaires, qu’une telle mesure impacterait la vie du peuple israélien pour les décennies à venir, ferait porter un coût insupportable à vos voisins palestiniens et contribuerait à faire manquer l’opportunité historique qui s’offre à vous, en tant que premier ministre ayant conduit aux destinées d’Israël pour la plus longue période de son histoire, ainsi qu’au peuple israélien, de sortir de la bataille qu’Israël mène aujourd’hui à perte, pour gagner la bataille de la paix. L’opportunité de transformer les gains militaires qu’Israël a obtenus sur les terrains régionaux en victoire politique durable au bénéfice de sa sécurité et de sa prospérité.

Les Etats-Unis, le Qatar et l’Egypte n’ont eu de cesse de faire aboutir un cessez-le-feu pour la libération de tous les otages. C’est notre priorité. La France a perdu plus de 50 de ses enfants lors du pogrom du 7 octobre. Trois otages français n’ont pas survécu. En pensant à eux tous, à la famille Bibas et aux David aujourd’hui, à la douleur et à la souffrance de tant de familles qui attendent toujours le retour de leurs proches, et à toute la douleur endurée par les Gazaouis, ma conviction est qu’agir avec humanité et courage pour mettre fin à cette guerre constitue notre devoir collectif, et la seule voie réaliste. Nous vous proposons une voie pour la suite, crédible, engageante pour la communauté internationale et les partenaires régionaux, qui seront au rendez-vous de la paix. C’est votre responsabilité de la saisir.

L’occupation de Gaza, le déplacement par la force des Palestiniens, leur réduction à la famine, la déshumanisation haineuse des discours, l’annexion de la Cisjordanie, n’offriront jamais une victoire à Israël. Ils viendront au contraire renforcer l’isolement de votre pays, nourrir ceux qui y trouvent prétexte à l’antisémitisme et mettre en danger les communautés juives à travers le monde. Les Palestiniens ne disparaîtront pas de la terre où ils ont aussi leur racine et nul ne voit quel chemin s’ouvrirait alors pour que la vocation d’Israël à rester une grande démocratie et le foyer national de la judéité, puisse se réaliser. En un mot ces mesures donneront la victoire à ceux qui refusent qu’Israël soit reconnu comme l’ami, l’allié fiable et le partenaire de confiance qu’il a vocation à être et que nous souhaitons qu’il soit.

La France ne peut se résoudre à voir ainsi un pays ami plonger dans un déchaînement de violence contraire à son histoire, ses origines et son essence démocratique et tourner le dos à la possibilité que l’histoire lui offre aujourd’hui. Je ne peux m’y résoudre et vous propose encore une fois, en ami fidèle, de travailler ensemble, avec tous les partenaires internationaux, à une paix durable pour vous, votre peuple et toute la région. Un cadre crédible pour une sortie de crise à Gaza est à portée de main. Un cessez-le-feu permanent est à portée de main. Quelle autre voie offrez-vous aujourd’hui à vos alliés et à votre peuple ?

Les images barbares de l’otage israélien Evyatar David ont rappelé au monde, si besoin était, que le Hamas ne devait plus jamais représenter une menace pour Israël ni jouer un rôle dans la gouvernance future à Gaza et des territoires palestiniens. Avec cette vidéo infâme, le groupe terroriste poursuit ce qu’il a constamment fait ces deux dernières années : blesser l’âme juive au plus profond, ce faisant nous offensant tous à vos côtés, prolonger le calvaire des otages et des familles et maintenir le peuple de Gaza dans une souffrance inouïe. En agissant ainsi, il cherche également à vous pousser à prendre des décisions irréversibles, qui ne serviront que sa survie et son emprise idéologique et jetteront Israël dans un avenir de guerre que vous avez aujourd’hui la possibilité et l’opportunité historique d’éviter.

La France sera toujours l’amie d’Israël et des Palestiniens et c’est à ce titre, Monsieur le premier ministre, que nous poursuivrons notre action pour la paix et la sécurité de tous.

C’est à ce titre, M. le premier ministre, que je vous appelle solennellement à sortir de la fuite en avant meurtrière et illégale d’une guerre permanente à Gaza qui expose votre pays à l’indignité et votre peuple à une impasse, à cesser l’illégale et injustifiable recolonisation de la Cisjordanie et à saisir la main tendue des partenaires internationaux disposés à travailler à un avenir de paix, de sécurité et de prospérité pour Israël et la région. »